L’idée semblait bonne en janvier quand je me suis inscrit au Vermont 100 un mois après avoir été pigé pour la course Western States 100. Deux courses de 100 milles à 3 semaines d’intervalle. La première en Californie et la seconde au Vermont. Un bon défi, un bel été en perspective. Mais ça, c’était avant que ma blessure au tendon d’Achille du pied droit se manifeste plus intensément…
Partie 2 : Courir dans l’humidité du Vermont
J’ai un peu tardé à vous partager mon récit de cette course. Le temps est précieux. J’avais plusieurs projets qui ont repoussé l’écriture de mon article. Mais, voilà, je prends quelques minutes pour déposer sur « papier » comment j’ai vécu cette 2e course de 100 milles en 3 semaines.
L’avant-course
C’est avec mon ami François que j’ai entrepris mon voyage vers l’aire de départ du Vermont 100. Il a été de mon équipe de support dans 2 autres de mes VT100. Il connaît très bien mes besoins dans ce genre de course. Cette fois, il sera seul pour me devancer à chacun des ravitaillements pour me préparer nourriture et vêtements.
Ce sera mon 4e départ de la course. Je connais bien le parcours qui est peu exigeant au niveau technique mais qui demeure exigeant à cause du caractère « rolling hills » incessant du parcours.
Juste avant mon inscription, je croise la directrice de course, Amy. Toujours pleine d’énergie, elle me mentionne qu’il y aura de très bons coureurs cette année. Je verrai bien lors de la course qui seront ces coureurs. Elle me demande mes plans pour la course. Comme j’ai bien récupéré de mon autre course de 100 milles, je vais tenter de maintenir un rythme comme en 2015 où j’avais fait 15h42.
Enfin, c’est l’inscription. Dossard 293. Puis, la visite médicale, le repas d’avant-course et la réunion d’informations. Je rencontre aussi plusieurs autres Québécois. Mais, avec un départ à 4h du matin, c’est vite direction motel pour une bonne nuit de sommeil.
La course
La température est confortable en ce samedi matin. Il fait chaud mais le ciel est nuageux. J’espère bien que les nuages resteront car on annonce plus chaud dans la journée. Comme d’habitude, les coureurs se dirigent sous l’arche du départ alors qu’il ne reste que 2 minutes avant le coup d’envoi. Je reconnais Brian Rusiecki et Mathieu Blanchard mais les autres visages sur la première ligne me sont inconnus.
Le départ est donné. Tout en descente. Je cours confortablement et je me retrouve en tête de course. Courir avec ma frontale. J’adore. Peut-être un peu trop. Je ne pourrai certainement pas maintenir ce rythme-là pour toute la course.
Les problèmes arrivent un peu plus vite que prévu. Suite à la WS100, j’avais eu des ampoules sous les pieds qui avaient fait peau neuve 2-3 jours avant le départ du VT100. À peine 1 heure dans la course et je sens déjà une ampoule sous mon pied gauche. Je n’ai pas prévu changer de souliers aussi tôt dans la course mais dans un ultra, vaut mieux adresser les problèmes lorsqu’ils surviennent plutôt que d’attendre. Je dois quand même patienter au premier ravitaillement où les équipes de support sont autorisés, au 35e km. Je parviens à ce ravitaillement avec 3 autres coureurs qui fileront pendant mon changement de souliers.
Peu de temps après, la matinée brumeuse laisse place à un ciel dégagé, de la chaleur et une sensation d’humidité désagréable. Ce sera les conditions météo jusqu’à la fin de ma course. Mais, si j’ai réussi à vaincre la chaleur des canyons à la WS100, je devrais y arriver ici aussi en utilisant la même stratégie : des petits bandeaux remplis de glaçons autour du cou et des poignets.
Trop préoccupé par ma douleur au pied en début de course, je réalise ensuite que mes fléchisseurs des hanches sont peu collaborateurs. Je suis très limité dans mes montées. Je ralentis. Et je glisse doucement au classement. Dans une longue montée que je suis contraint à marcher, je me fais dépasser par un coureur qui porte la barbe comme le coureur de l’ouest américain, Hal Koerner. Il lui ressemble aussi. Je ne fais pas de commentaire et je le laisse filer loin devant. À la mi-parcours, un coureur en chemise ressemble étrangement à un autre coureur dont on entend moins parler ces temps-ci : Michael Arnstein. J’ai un doute. C’est peut-être lui finalement. Je continue ma course en alternant course et marche rapide. Je me maintiens longtemps en 7e position. Des idées noires se faufilent. Pourquoi m’infliger cette distance. Mais je continue à aller de ravito en ravito. Je suis tout de même rassuré quand je réalise que mes temps de passage sont semblables à ceux de 2014 où j’ai fait 16h45.
De temps en temps, j’ai un regain d’énergie ce qui me permet d’entamer les 50 derniers kilomètres en 5e position. À partir du 75e mille, je vais jouer au chat et à la souris avec un autre coureur. Je sais que je flirt avec un temps final de 17 heures et que d’autres coureurs s’en viennent. Mon avantage, par contre, c’est que je connais ce qui m’attend d’ici la fin. Lors du dernier ravitaillement où François m’attend, je fais un arrêt éclair pour entamer les 8 derniers kilomètres. Et aussi loin que je peux regarder, plus personne n’est derrière moi maintenant. La pénombre s’installe et j’allume ma lampe frontale. Le dernier ravito passé, il ne reste qu’une longue montée. Mais voilà, j’aperçois une lampe frontale…devant moi. La personne tente une relance mais dès que le chemin monte, elle doit marcher. Moi, je cours. À moins de 2 kilomètres de la fin, je m’empare de la 4e position. J’accélère pour la garder. Je vole dans la descente. Je termine en force en passant sous l’arche en 17h01.
L’après-course
Un autre 100 milles de complété. Enfin. Je peux m’arrêter. Disons que ma tête aimait bien la vitesse à laquelle le sang circulait. Un bon retour veineux et une bonne éjection de sang vers mon cerveau. En arrêtant brusquement : Bang!!! Vertiges, nausées… et quelques vomissements. C’était beau à voir avec mon sourire de finisher. Mais, pas de panique. Je m’étends par terre et j’élève mes jambes. Ça finit par passer heureusement.
Après une bonne nuit de sommeil, je retourne au finish pour voir les derniers coureurs franchir la ligne d’arrivée. Je croise un coureur Américain qui m’apprendra que c’était bien Hal Koerner et Michael Arnstein que j’ai croisés durant ma course. Ah ben!!! Les coureurs y ressemblaient vraiment. Ça fait du sens.
Pas facile cette course mais heureux de l’avoir finie en force. Une autre expérience dans mon baluchon. Courir 2 courses de 100 milles en 3 semaines, c’était beaucoup. Mais, je l’ai ma 4e belt buckle du VT100. Un 5e l’année prochaine et j’aurai la boucle spéciale de 500 milles. Et François m’a mis de la pression. Il m’accompagne seulement si je vise la victoire… À suivre. Il y aura bien d’autres défis d’ici là…
Sébastien