Courir 110 km, ce n’est pas si fou que ça, finalement

20160518_C4365_PHOTO_FR_693401Fondation Québécoise du cancer   Programme à Félix         Défi FDH                     .


 » La plus grande sagesse de l’homme consiste à connaître ses folies « 
– Madeleine de Souvré, marquise de Sablé


Courir 110 km lors du Défi Félix Deslauriers-Hallée (Défi FDH – Fondation Québécoise du Cancer) ce n’est pas si fou que ça. Mais, vouloir réaliser cette course seulement deux semaines après mon Weekend choc dans les Chic-Chocs en Gaspésie (2 courses – 147 km – Dénivelé positif de 7200m – 23h30 à courir) alors là…

Mais, je suis sage, quand même. Je m’en suis tenu à une distance de 110 km sur la route soit le parcours « long » des cyclistes lors du Défi FDH le samedi 9 juillet. Une distance que j’estimais pouvoir courir en 10-12 heures. Ça ne vous semble pas très sage? Mais sur ma liste, il y avait aussi « courir durant 20h »…

SLP_7434Courir 110 km ce n’est pas si fou que ça. Mais, courir le demi-marathon de Sherbrooke une semaine après la Gaspésie et une semaine avant le Défi FDH alors là…. La course s’est bien passée finalement : 1h18; 7e position overall et 2e position master (> 40 ans).

Mais, je suis sage. Ce n’est pas la vitesse à laquelle je veux faire mon 110 km. Mais une vent de panique m’a gagné la semaine précédant ma course. Des douleurs au cou et un torticolis se sont manifestés. Durant mon demi-marathon, j’ai dû courir un peu moins détendu que normalement. Mes remèdes: massage, courir (oui, oui) et croire que le temps va améliorer tout ça. Parce que cette douleur était probablement aussi une manifestation du poids que représentait le défi à venir suite à la Gaspésie et le Demi de Sherbrooke. Mais, j’étais prêt à prendre le départ et j’étais prêt à ralentir.


110 raisons pour courir 110 km

La veille de ma course, lors du coquetel d’inauguration de la 6e édition du Défi Félix Deslauriers-Hallée, on m’accordait un peu de temps pour une allocution étant donné mon implication comme Président d’honneur. J’ai fait ça très court en présentant mes 110 raisons pour courir 110 km. Folie ou sagesse? Je vous laisse juger.

Courir 110 km, c’est

  1. Un fragment de pensée: Une idée qui vient comme ça. Elle germe. Parfois c’est long, parfois c’est court. Puis, j’élabore mon défi. Il ne reste alors qu’à le réaliser.
  2. Un entraînement: Parce que 110km, ça va me préparer à autre chose, c’est sûr.

Courir 110 km pour

  1. Ma santé physique
  2. Ma santé mentale: Même si plusieurs pensent que courir autant, c’est un PROBLÈME de santé mentale…
  3. Le plaisir
  4. Découvrir
  5. Me découvrir
  6. Explorer l’inconnu
  7. L’aventure
  8. L’expérience
  9. Prendre une bonne douche: On annonce de la pluie. Je n’y échapperai pas.
  10. Passer du temps seul…et avec d’autres
  11. Vivre
  12. Mieux vivre
  13. Vivre des difficultés
  14. Vivre le moment présent
  15. Vivre des émotions fortes
  16. Sentir
  17. Ressentir
  18. Naître
  19. Me connaître
  20. Oser
  21. Justifier ma séance de yoga le lendemain

Courir 110 km, un témoignage de

  1. Persévérance
  2. Dépassement de soi
  3. Résilience
  4. Confiance
  5. Courage

Courir 110 km pour

  1. La douleur
  2. Le calme
  3. La liberté
  4. L’énergie
  5. La joie

Courir 110 km parce que

  1. 10 km, c’est trop difficile
  2. 10 km, c’est trop facile
  3. 10 km, ce n’est pas assez long
  4. 110 km, c’est un échauffement

Courir 110 km pour

  1. Laisser une chance aux coureurs du 10 km: Car j’ai l’intention de faire la course de 10km vers 19h, après mon défi.
  2. Inspirer
  3. Motiver
  4. Inciter
  5. Partager
  6. Rencontrer
  7. Les paysages
  8. Visiter
  9. Voyager
  10. Bouger
  11. Agir

Courir 110 km parce que

  1. Il y a souvent de l’alcool à la fin
  2. Ça m’aide à dormir: On parle de la course, bien sûr, et non du point précédant…
  3. Je veux voir comment mon corps et ma tête vont grandir de cette épreuve

Courir 110 km

  1. à 98. Pour le sourire et l’implication de chacun des bénévoles et de chacun des membres du comité organisateur

Courir 110 km pour

  1. M’exprimer
  2. Trouver mon rythme
  3. Créer
  4. Mon bien être

Courir 110 km parce que

  1. Je suis un passionné
  2. La satisfaction vient en donnant son 110%
  3. Une course peut nous changer
  4. Je veux saisir l’opportunité
  5. Je n’ai pas peur de l’échec

Courir 110 km pour

  1. La promotion des saines habitudes de vie
  2. Soutenir une bonne cause et ses projets: Courir pour amasser des fonds pour le Défi FDH.

Et finalement, courir 110 km parce que

  1. Je suis un Guerrier Pacifique: Suite à mon défi au Mont Orford en septembre 2015, je m’étais proclamé « Guerrier pacifique ». Un défi qui était le témoignage de la résilience. Et je ne me trompe pas en disant que Félix, qui est décédé d’un cancer, était lui-même un « Guerrier pacifique » qui nous a légué ce weekend sportif.

Ma course en 23 points

Et maintenant, comment s’est déroulée ma course?

Voici le trajet:

Screen Shot 07-23-16 at 11.57 PM(Le trajet officiel est ici)

En révisant les données de ma montre, ça m’a fait revivre ma course. Les endroits où la cadence (min/km) est plus lente sont des fenêtres sur des points saillants de ma course. Je vous partage ce qui s’est passé durant ma course :

Cadence et dénivelé

  1. Départ à 7h05 du Parc Jacques-Cartier de Sherbrooke accompagné de Claude Fraser qui me suit à vélo. Au début, on croyait qu’il serait avec moi que pour 25-30 km. Finalement, nous ferons 60 km ensemble.13653010_1295696987126776_2223911465031517186_o
  2. Une pause-pipi. Une pluie fine débute.
  3. Une pluie froide et intense me mouille complètement. Elle débute 5 minutes avant mon arrivée au premier ravitaillement à Ste-Catherine-de-Hatley. J’utilise les ravitos des cyclistes moi aussi. Malgré la pluie, les bénévoles sont souriants… et étonnés par mon défi. Les cyclistes viennent de partir. Quand vont-ils me rattraper? J’enfile un coupe-vent avant 13603351_1295697203793421_1291232831247677718_od’entreprendre la descente.
  4. Déjà au 2e ravito. La pluie a cessé. J’enfile un gilet sec cette fois. Une réflexion. Un paradoxe. Lorsque je cours en sentiers, on me fait la remarque que je ne dois pas avoir le temps d’admirer les paysages. Mais pourtant, lorsque je cours sur la route, j’ai le temps de voir bien des choses qui défilent trop vite en voiture ou en vélo.
  5. La marque du marathon est déjà dépassée. Un 3e ravito à Magog. Celui-là est improvisé car maintenant, il y a Anthony qui m’attend à des points de rencontre avec ma nourriture et mes vêtements de rechange dans sa voiture. Les premiers cyclistes me dépassent. Un autre pipi.13619852_1146044325452681_8934950831995781771_n
  6. 50 km en 4 heures. Un autre arrêt. Pour changer les souliers cette fois. Une bonne décision car je sens une ampoule qui se forme sous un de mes pieds.
  7. Oups. Un de mes lacets est trop serré.
  8. Tous les cyclistes m’ont rejoint. Nous sommes au ravito de Deauville. Anthony a laissé mes sacs mais la personne qui assure la relève en voiture n’est pas encore là. Un petit tracas. Mon accompagnateur à vélo, lui, poursuit son chemin sur le parcours de 80 km. Moi, je vais vers Ste-Élie.
  9. La voiture-balais me rejoint. Elle assure la sécurité et enlève les affiches sur le parcours. Je suis officiellement le dernier sur le parcours. Une longue montée approche. Un autre pipi avant de l’attaquer.
  10. La montée est ardue. La stabilité des 60 premiers kilomètres a été rompue. Un moment difficile jusqu’à ce que Rébecka me croise sur la route vers le 68e km. C’est elle qui assure mon ravitaillement maintenant. La météo est toujours menaçante. Depuis mon départ, j’ai droit à de la pluie fine ou forte ou encore un couvert nuageux. Là, il pleut.
  11. Ravitaillement à Ste-Élie, juste avant d’aller vers St-Denis-de-Brompton. Les chips et le coke sont plus que bienvenus.
  12. Une autre montée difficile mais je m’accroche et poursuis. Un pied devant l’autre. Courir autant de kilomètres sur la route, c’est difficile. En montagne et en sentiers, le rythme change au gré des montées et des descentes. Sur la route, on peut toujours courir.
  13. Un autre ravito. Deux marathons complétés. La pluie a cessé. J’en profite pour changer de gilet. Je contacte Chantal Rivest de Radio-Canada qui veut faire un reportage à mon arrivée. Je lui annonce que je suis bien plus rapide que prévu.
  14. Une pluie intense recommence. Oublions le gilet sec. Et toute cette pluie me donne encore envie. La montée est encore difficile.
  15. Un appel sur mon cellulaire. C’est Jean Arel de Radio-Canada qui veut me rejoindre sur le parcours pour faire une entrevue. Notre point de rencontre : École Alfred Desrochers à Ste-Élie.
  16. Lui et son caméraman sont plutôt rapides. M. Arel me propose une entrevue inusitée. Il m’installe un micro et il me suit en voiture. Une entrevue en courant. Une entrevue après 92 km de course. Réflexions et philosophie sur la course. Voici ce que ça donne.
  17. Avant-dernier ravito. J’approche du vieux Rock-Forest. Mon équipe de soutien a encore changé. D’autres visages. Plein de personnes pour m’aider dans mon défi et pour en faire une réussite.13626635_1146080788782368_4359502319674940217_n
  18. Kilomètre 97. Ma montre a une limite de temps. Il reste encore environ une heure à courir.
  19. Kilomètre 99. Église de Rock-Forest. Ce sera mon dernier ravito. Pas le temps pour une prière. Ma religion, c’est la course… Je laisse le micro à l’équipe de Radio-Canada et je repars pour terminer mon défi.
  20. Kilomètre 101. Lorsque j’ai fait mon Défi au Mont Orford, j’avais croisé mes enfants au sommet avant ma dernière descente. Mais à mon arrivée à la base, j’ai réalisé que j’aurais bien aimé les voir à la toute fin. Pour mon défi d’aujourd’hui, j’arrête donc pour appeler mon ex-conjointe et voir si elle peut venir avec les enfants à mon arrivée que je prévois vers 16h45. C’est un répondeur. Je laisse un message.
  21. Kilomètre 108. Un dernier pipi avant la fin. Et la pluie intense débute à nouveau. Bon, je vais terminer cela trempé comme un canard.
  22. Kilomètre 111. Un bénévole m’attend à l’entrée du Parc et annonce mon arrivée.
  23. Kilomètre 112 (parce que ce n’est pas 110 km mais bien 112 km que j’aie couru). L’arche pour les courses de la soirée est déjà en place et un ruban n’attend que mon passage pour tomber. Il n’y a pas une grande foule. De toute façon, ce n’est pas pour la foule que je cours mais pour bien d’autres raisons comme vous avez lu plus haut. Et, non loin de l’arche, cachés sous un arbre pour se protéger de la pluie, mes 3 enfants sont là.

13624439_10154245626148503_1726252075_nFinalement, j’ai parcouru les 112 km (et non 110) en 9h47 pour terminer à 16h52. Une moyenne de 5:15 min/km. Un premier marathon en 3h21 et un deuxième en 3h45 environ. Ce qui m’étonne le plus en regardant mes données, c’est ma cadence à la course qui était très régulière lorsque j’étais en mouvement. Toujours autour de 5 min/km.

Avec la météo annoncée, je n’aurais jamais fait une sortie de 112 km par moi-même. Courir pour une cause, c’est motivant. La réussite de ce défi, je dois la partager avec tous ceux qui m’ont accompagné, tous les bénévoles qui m’ont encouragé. Quand j’y repense, la météo m’aura été favorable en me gardant froid durant tout le trajet. Et comment faire fi de la douleur qui se pointe de temps à autre? L’accepter, oui. Mais aussi, se concentrer sur autre chose. Les cyclistes qui me font la chasse, les gens que je vais rencontrer au prochain ravito, la pluie, une entrevue inusitée, savoir que la fin approche. Et le plus important : rester en mouvement, aller de l’avant…parce que la douleur finit toujours par passer. Un peu de sagesse.

Et pour le 10 km à 19h? J’ai décidé de ne pas le faire. La sagesse, encore.

Et le lendemain, lors de la conférence que je présentais, quelqu’un a demandé: « Comment récupérer d’une telle course? »

Ma réponse : « En bougeant. Juste avant de venir, j’ai fait l’ascension et la descente des monts Orford et Giroux et je viens de terminer la séance de yoga qui avait lieu ici même ».

Folie ou sagesse?

Et maintenant, mon regard est tourné vers L’Ultra-Trail du Mont Blanc le 26 août prochain. 170 km et 10000 mètres de dénivelé positif  en montagnes. Mais, me connaissant, il y aura certainement une longue aventure dans les Montagnes Blanches avant…comme la double traversée de la Présidentielle.

Folie ou sagesse?

Sébastien

www.sebastienroulier.com

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