Weekend choc dans les Chic-Chocs

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Parc National de la Gaspésie (Photo: CHOK Images)

Il y a vingt ans exactement, j’entreprenais Mon Grand Tour. Un voyage à vélo en Gaspésie avec un départ et une arrivée à St-Bruno-de-Montarville, ma ville natale. Un périple de 2500 km sur la route qui m’amènera à contourner le Parc National de la Gaspésie. Tout ça en trois semaines. Une aventure enrichissante réalisée avec un ami. Ça aura été ma seule visite dans cette belle région jusqu’à tout récemment.


Le Parc de la Gaspésie et le massif des Chic-Chocs sont des mystères pour moi. Comme tout le monde, j’ai entendu parler des caribous, de la neige poudreuse l’hiver qui persiste tard l’été, des sommets exposés et des grosses roches pour y parvenir. Mais pour bien m’imprégner d’une région, rien de mieux que de la parCOURIR.

Ultra-Trail-du-Mont-Albert_FFComme mon billet à la loterie de la Western States 100 Run n’a pas été pigé, je me suis alors tourné vers l’Ultra-Trail du Mont Albert à la fin juin. La course de 100 km, l’Ultra Sky Marathon, bien sûr. Une bonne préparation pour l’Ultra-Trail du Mont Blanc (UTMB), deux mois plus tard. Comme mes mois d’avril et mai ont été très occupés, je me suis plongé dans les préparatifs de ma course qu’à la mi-juin, soit environ deux semaines avant le départ. Déjà depuis le printemps, j’avais réalisé de gros défis avec de gros doublés certains weekends pour bien préparer mon corps au stress d’une course de 170 km. Mon plan était d’aller explorer le parc le lendemain de ma course de 100 km comme je le fais souvent dans les Montagnes Blanches. Par contre, quand j’ai réalisé qu’une course de 42km, le Sky Marathon, avait lieu le lendemain de mon 100 km, alors, j’ai plutôt opté pour faire un doublé : 100 km le samedi dans le secteur du Mont Albert et 42 km le dimanche dans le secteur du Mont Jacques-Cartier.

MapUltra Sky Marathon du Mont Albert : 100 km (ou plutôt 103 km) et 5200 mètres de dénivelé positif

La route est longue de Sherbrooke à Ste-Anne-des-Monts. Presque 8h non-stop. La vue est intéressante par contre. Le Fleuve est immense. Et puis, on rentre vers les Montagnes pour découvrir finalement le Gîte du Mont Albert et un aperçu des hauts sommets. Le Sky Village, situé tout juste à côté de l’accueil du Parc National de la Gaspésie, est le lieu de rassemblement des coureurs. Il y a des visages connus et d’autres inconnus mais beaucoup avec le désir de se dépasser durant le weekend. Les organisateurs, Roxanne et Matt, nous font un briefing d’avant-course. Je sais maintenant quoi faire en présence d’un ours ou s’il y a un orage…

Une bo13516621_10207377398488682_63758045104713970_nnne nuit de repos dans un refuge tout près et déjà, il est 2h du matin. Un réveil trois heures avant le départ pour manger et m’habiller. Mon matériel, lui, est déjà prêt depuis Sherbrooke. J’ai un peu de temps pour me reposer dans mon mini-van avant de me pointer sur l’aire de départ. La température est agréable. Il y a de la fébrilité. Le coup d’envoi est donné à 5h. Et la journée commence.

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Photo: CHOK Images

Les premiers kilomètres vont bien jusqu’à ce qu’on longe un ruisseau sur un sentier jonché de grosses roches. Ce genre de terrain ne me convient vraiment pas en course. Je me fais dépasser par plusieurs coureurs. Une montée abrupte m’amène à traverser une section enneigée qu’il faudra descendre prudemment plus tard, sur le retour. J’arrive enfin sur une section vaste et dégagée d’arbres. C’est exactement pour ça que cette course m’intéressait. Mais je ne savais pas que cette section ne durerait pas si longtemps. Rapidement, je me retrouve dans des sentiers techniques avec roches et racines. Semblable au Sentier des Crêtes du Parc du Mont Orford… Encore là, un terrain qui ne me convient pas du tout en course. Mais, il paraît qu’il faut travailler nos faiblesses… Par chance, je connais aussi mes forces : mon endurance et ma détermination. Mes pensées m’amènent ainsi à conclure que je dois demeurer prudent et éviter les faux pas. Le terrain et surtout la distance viendront à bout de plusieurs coureurs. Il y a un taux important d’attrition dans ce genre de course et je ne veux pas en faire partie. Alors, je trouve mon rythme et profite de ce qui s’offre à moi.

Quelques heures après le départ, le soleil et sa chaleur se pointent. Un autre facteur qui affecte le taux d’attrition. La chaleur affecte ma foulée aussi. À tous les ravitaillements, je fais le plein d’eau et de boissons sportives. Je prendrais bien une dizaine de degrés de moins… Malgré tous les liquides que j’ingère, mon urine est plutôt foncée. Sur la charte de la couleur des urines, je suis plutôt entre Pale Ale et Indian Pale Ale… dehydration-color-chartJe décide alors de maintenir mon rythme en évitant d’être dans le rouge. Je ne suis pas le plus compétitif des coureurs, mais quand on porte un dossard, on pousse toujours un peu plus la machine. Alors, mon mantra sera pour le reste de la course : « Il ne faut pas que tu surchauffes. Même si tu te fais dépasser, c’est pas grave. C’est une longue course. Il y aura des abandons. » Et, j’avais la certitude que je n’en ferais pas partie.

J’atteins enfin la mi-parcours. J’y croise Richard (Hachem) et Mathieu (Louchard) avec qui je vais partager les sentiers lors du retour. Parfois, le temps d’un dépassement et parfois un peu plus longtemps. En arrivant au ravito du 75e km, on nous informe que nous sommes en 4e position. Les échanges de position vont se poursuivre pour quelques kilomètres encore mais le classement va se préciser avant le sommet du Mont Albert sur le retour. Sur le plat et dans les montées, j’en arrache. Mais dans les descentes, ça va. J’en arrache vraiment dans la montée du Versant vers le sommet du Mont Albert mais la dernière section, toute en descente, me convient. Malgré la pénombre, je n’ai pas besoin de lampe frontale. La pluie débute. Elle est bien appréciée. Mon objectif, maintenant : terminer sous les 16h. Je pousse un peu plus. J’entends l’annonce de l’arrivée de Mathieu. J’arrive bientôt moi aussi. Et tout juste avant l’orage, je franchis la ligne d’arrivée en 15h58, bon pour la 6e position. Et comme anticipé, le taux d’attrition aura été majeur. Environ 50% des coureurs ont abandonné leur course…

Richard, Sébastien et Mathieu à l'arrivée du 100km du Mont Al

Enfin! La course est terminée. Avec Richard Hachem (4e) et Mathieu Louchard (5e). Photo: Éric Côté

Un 103 km difficile, des urines limite. « Eh non!!! Je ne ferai pas la course demain matin » ont été parmi les premiers mots lancés à la fin de ma course. Et c’est dans cet esprit que je retourne au refuge pour une douche, manger et dormir.

Sky Marathon du Mont Jacques-Cartier : 42 km (ou plutôt 44 km) et 2000 mètres de dénivelé positif

Le sommeil n’est pas le meilleur. Des raideurs et des crampes dans les jambes et les pieds n’aident aucunement à trouver une position confortable. Je réussis tout de même à dormir un 3-4 heures. Je me réveille à 6h30 toujours avec les mêmes intentions qu’à mon coucher. Je veux cependant aller encourager ceux qui prendront le départ du Sky Marathon à 8h. J’arrive dans le stationnement de l’accueil du Parc vers 7h15. En me dirigeant vers le Sky Village, j’arrête mon chemin au bâtiment principal de l’accueil. Tout est fermé. J’achèterai la glace pour ma glacière un peu plus tard. Puis, je détourne mon regard vers l’affiche extérieure des activités dans le Parc. Et là, je vois les images du Mont Jacques-Cartier. Ma réflexion est courte. Ce serait bien dommage de venir dans le Parc National de la Gaspésie sans voir le sommet du Mont Jacques-Cartier… et peut-être quelques caribous. À 7h30 précise, soit 30 minutes avant le départ, je retourne à ma voiture pour préparer ma course. Rien n’est prêt mais tout est à portée de mains. J’enfile mes vêtements de course et ré-installe mon dossard. Je garnis mon sac à dos d’eau, de gels et de boissons sportives ProCircuit et quelques collations. Je prends des bouchées de bagel et une banane, de précieuses calories pour débuter la course. Un petit tour aux toilettes et me voilà sur la ligne de départ. 13521941_10157076498495416_4113328841536926242_nJ’y croise deux autres guerriers qui avaient la même ambition que moi au début du weekend. Par contre, un des deux a dû abandonner au 75e km la veille. Il accompagne son compatriote dans ce 2e défi en deux jours. Aujourd’hui, même si je porte un dossard, il n’y aura aucune compétition. Je veux entreprendre cette 2e journée en effectuant une rando-course. Bouger vite, certes, mais en conservant mon énergie et en évitant trop de dommages musculaires.

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Photo: La Clinique du Coureur

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Photo: CHOK Images


La course est un aller-retour. Une première section en forêt nous amène au premier ravito. Puis, la montée vers le Mont Xalibu nous amène dans une section très à découvert. Ah!!! Toucher le ciel. La majeure partie de ce qui suivra sera loin des forêts denses. La chaleur est accablante mais il y a de la neige pour se rafraîchir. J’atteins le sommet du Mont Jacques-Cartier sans jamais me questionner si j’ai fait le bon choix de courir aujourd’hui. Un peu plus loin, c’est la mi-parcours… et je sais très bien ce qu’il y aura au retour.

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Photo: Land’s End Expedition Racing (R. Tanase-Mason)

Et le retour se déroule sans trop de difficulté. Aucun caribou à l’horizon. Je porte mon attention maintenant sur les grosses roches. Je ne suis pas fatigué mais je dois être prudent dans la descente. J’ai tout de même plusieurs kilomètres dans les jambes. Et puis, c’est la descente du Mont Xalibu et la descente en forêt. Et comme la veille, mes muscles adorent ça. Je rattrape quelques coureurs et termine loin derrière le vainqueur en 44e position et 7h25 de rando-course. J’apprendrai plus tard que j’aurai été le seul à compléter les 2 épreuves.


ParCOURIR le Parc National de la Gaspésie, ce sont de belles vacances. Mais dès le lendemain, c’est avec mes enfants que je passerai quelques jours en refuge dans le secteur du Diable Vert à Glen Sutton. Donc, peu de temps après ma course, vers 17h15, je suis sur mon départ pour revenir à Sherbrooke. Un trajet effectué sans arrêt pour arriver à 1h du matin environ et profiter d’une bonne nuit de sommeil avant un tout autre défi…

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Bientôt, je vous raconte mon défi de 112 km en 9h47 sur les routes de l’Estrie lors du Défi Félix Deslauriers-Hallée (Fondation Québécoise du Cancer) le 9 juillet dernier

Sébastien

www.sebastienroulier.com

Équipement: Souliers Montrail Fluid Flex FKT (Ultra Sky Marathon) et Caldorado (Sky Marathon); veste Ultimat Direction Mountain Vest 3.0

Énergie: boisson sportive Pro Circuit X1+BCAA et gels Pro Circuit X4-carb et X4-cafeine

Logos 2015 - 6 logos pyramide

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