Double défi

 » If you fail to prepare, you’re prepared to fail.  »  – Mark Spitz


Tout est dans l’entraînement. À la course, à la guitare ou au théâtre. Tout est dans la pratique. Répéter. Les communications nerveuses deviennent plus rapides. Des automatismes se créent. Mais, au fil des ans, il faut changer la formule pour amener de nouvelles adaptations.

Lors de l’entraînement pour un ultramarathon, on parle souvent du weekend choc. Courir de longues distances les 2 ou 3 journées du weekend. Rarement, j’ai inséré cet exercice dans mon calendrier. Mais après mon doublé Marathon de Boston – Boucle du Mont Lafayette, j’ai eu une idée. Une idée semblable. Amener un stress supplémentaire dans une sortie qui suit un effort intense. Souvent, c’est le repos après une grosse course. Il y a quelques années, c’est même une sieste que je devais faire à la fin de ma course. Mais, mon corps s’est adapté. Et là, je peux amener un stress nouveau pour rendre facile les défis qui m’attendent plus tard en 2016.


Le samedi 30 avril : 80 km au North Face Endurance Challenge de Bear Mountain

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Photo crédit: La Clinique du Coureur

Un vol plané. À peine 45 minutes dans la course. Déjà le genou gauche est en sang et l’épaule gauche endolorie. Et ma gourde à main explose dans ma chute. La première demi-heure à la noirceur s’est bien passée mais depuis quelques minutes, j’accroche toutes les roches et racines qui jonchent le sol. Et il y en a beaucoup. Je n’ai pas eu la chance de courir beaucoup en sentiers techniques récemment. Mes réflexes sont plutôt au ralenti. Ma coordination visuo-motrice est déficiente. Et ça se poursuit pour quelques kilomètres. Je glisse au classement. Je ne peux pas maintenir le rythme des coureurs en tête de course. La fatigue accumulée suite à mes courses du mois d’avril et surtout les longs voyages pour m’y rendre m’amène à ralentir. Mais, je gruge les kilomètres tranquillement. La course est encore jeune. Tout peut changer dans un ultramarathon.

Et tout a changé. Le moment exact est clair dans ma tête. Scott, de Montréal, vient de me dépasser. Je suis au ralenti et je le vois filer quelques mètres devant moi. Alors que je lui crie pour lui indiquer le chemin qu’il vient de manquer, je passe devant lui. C’est à ce moment que mon corps s’est réveillé. Un déclic. Pourquoi? Aucune idée. Après 2h30 de course, je retrouve mon rythme. Mes réflexes aussi. Tout devient plus facile. Je gagne plusieurs positions pour revenir dans le top 10.

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Photo crédit: La Clinique du Coureur

Nous sommes 4 coureurs à échanger de position avant que j’emprunte un mauvais chemin. Quelques minutes de perdues et quelques positions aussi. Voulant précipiter ma cadence pour rattraper les coureurs, je fais un second vol plané. Cette fois, je me cogne le genou, toujours le gauche, sur une roche. Ouch!! Je peux marcher. Je peux courir. Rien ne semble cassé. Et je poursuis ma course. La chaleur qui monte me ralentit vers la fin du mais le moral est bon et le sourire est présent.

Je termine finalement en 10e position en 7h52. Un temps sous les 8h était mon objectif. C’est également un record personnel sur ce parcours. Une amélioration de 28 minutes. Et je récolte quelques points ITRA pour une future participation à une course exigeant ces précieux points.

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Plusieurs Québécois sont présents. Plusieurs belles performances. Plusieurs belles rencontres. Mais, déjà je dois quitter pour mon deuxième défi. Direction : les Montagnes Blanches. Un souper sur la route et j’arrive à destination vers minuit pour une nuit dans ma mini-van.

Le dimanche 1er mai : 35km en rando-course sur le Franconia Ridge

La nuit a été bonne. Quelques raideurs, bien sûr. Mon genou gauche est enflé mais il ne m’empêche pas de me déplacer. Un petit déjeuner et hop, je suis sur la route pour me rendre à mon point de départ : Lincoln Woods Visitor Center.

Il est 8h40 quand j’entame mon périple. Mon objectif est de faire la Pemi-Loop. Cinquante kilomètres difficiles. Mon meilleur temps est d’environ 9h30.  Mais là, j’estime plutôt que mon aventure prendra 11 heures. Je m’accorde tout de même la possibilité de changer mon parcours. On annonce de la pluie plus tard dans la journée. Et les sentiers, je les soupçonne enneigés.

DCIM100GOPROJ’emprunte Osseo Trail qui m’amène dans une longue montée vers le Franconia Ridge. Dans le long escalier menant au premier sommet, il y a un peu de glace mais je n’ai pas encore besoin des crampons. J’atteins mon premier sommet, le Mont Flume, duquel je vois le Mont Lafayette. Je devrai par contre atteindre les sommets des monts Liberty, Little Haystack et Lincoln avant de l’atteindre. Entre le Mont Flume et le Mont Liberty, il y a une longue deDCIM100GOPROscente et une longue montée sous le couvert des arbres. Les sentiers sont enneigés et glacés. Pas le choix, il faut mettre les crampons. L’histoire se répète pour atteindre Little Haystack. Je songe à modifier mon parcours depuis quelques temps déjà. La partie au-delà de Lafayette est plus isolée, parfois à découvert et surtout plus à pic. Pour éviter une chute sur la pente glacée du Garfield Ridge ou du Mont Garfield, je songe à faire un demi-tour à Lafayette.

DCIM100GOPROAu sommet de Little Haystack, je suis accueilli par du vent et des flocons de neige. La crête vers Lafayette est dépourvue de neige et de glace mais les roches humides sont glissantes. Ma décision est prise, ce sera un demi-tour à Lafayette. Lorsque j’atteins ce point, la neige devient de la pluie. Je suis bien protégé par mes vêtements mais je le serai encore plus lorsque je serai de retour sous le couvert des arbres. Et là, au moins, je sais ce qui m’attend pour le retour. Le rythme est bon pour le retour…et la pluie ne va pas cesser.

DCIM100GOPROScreen Shot 05-01-16 at 09.35 PMJe suis de retour à ma voiture après environ 35km de rando-course en 6h50. Au moins, en changeant mon itinéraire, je n’arriverai pas trop tard chez moi.


Les entraînements sont une partie très intéressante de ma saison. Aucune pression. La possibilité d’explorer. La fatigue peut s’accumuler mais le rythme des sorties permet de la supporter. La course, quant à elle, est une belle façon de mesurer les acquis. C’est beaucoup plus exigeant par contre. Le rythme est plus exigeant… et les dégâts sont plus importants. Et il faut respecter la période de récupération. Mais le corps s’adapte et même cette période peut devenir plus courte. J’ai fait beaucoup de courses en avril. Un 100km, un marathon et un 50 miles. Je dois maintenant permettre à mon corps, mes muscles et ma tête de récupérer. Une seule course officielle m’attend en mai. Je vais pouvoir me reposer…juste un peu, car mes entraînements se poursuivent.

Sébastien

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