Souvenirs des Montagnes Blanches: Quête et conquête des 48 sommets de plus de 4000 pieds (2)

À peine ma première aventure terminée que je planifiais déjà la prochaine. Ma plus longue sortie en autonomie dans les Montagnes Blanches au New Hampshire allait commencer bientôt. Mon objectif, toujours atteindre les sommets de 4000 pieds et plus.

« C’est dans l’adversité qu’on devient plus fort. » (proverbe)

Je sais que dans mon prochain défi, il y aura des moments difficiles. Plus mes parcours sont longs, plus il y a de chance que ça aille mal. Je ne pars pas avec l’idée que des problèmes vont survenir. Mais, je m’entraîne à y réagir, à m’adapter. La résilience et la persévérance, ça se pratique.

13-14 août 2017

Conquête de 15 sommets sur le sentier du Mont Isolation, le Wildcat-Carter-Moriah Range et la Presidential Range

6h

Départ du Webster Cliff Trail sur la route 302. Ma première destination est le Mont Isolation. Pour une première fois dans les Montagnes Blanches, je commence par des sentiers plutôt plats. Une bonne façon pour se délier les jambes après un réveil matinal quatre heures plus tôt et un peu plus de 2 heures de route.

 

La Saco River Trail et la Dry River Trail sont mes « sentiers warm-up ». Je longe la Dry River sur plusieurs kilomètres. Elle doit être beaucoup plus gonflée au printemps. Aujourd’hui, de grosses roches sont apparentes et il y a beaucoup de troncs d’arbres échoués. Je traverse un pont suspendu pour poursuivre mon chemin sur le versant est de la rivière.

J’emprunte ensuite Isolation Trail. Après 10-15 minutes sur ce sentier, j’ai un doute si je suis réellement sur le bon sentier. Je rebrousse chemin jusqu’à l’intersection précédente pour réaliser que c’était bien le bon chemin. Le sentier n’est pas marqué et il est encombré de débris. C’est un sentier qui semble peu emprunté. Je crois qu’on devrait l’appeler « Desolation trail » plutôt.

9h46 (temps en mouvement : 3h46)

Au sommet du Mont Isolation. Aucune visibilité. Je m’y attendais. J’ai repoussé mon départ de 24 heures en sachant que j’aurais les restes d’une soirée et nuit d’orages et qu’un dégagement surviendrait plus tard dans ma journée.

Je reviens sur mes pas pour suivre Davis Path et ensuite Glen Boulder Trail. La section en altitude m’offre de la pluie, des vents forts et une visibilité réduite. J’aime les défis de la montagne. Une force sournoise qui nous oblige à s’adapter constamment. Et dans de longues sorties comme celle-ci, la planification est importante tant pour l’hydratation, la nourriture, les vêtements et l’équipement. Et je suis prêt pour toutes intempéries avec mon sac à dos chargé de 15 livres de choses essentielles.

La descente sur Glen Boulder Trail n’est pas de tout repos. Les roches sont très glissantes. Le fameux « boulder » d’où vient le nom du sentier est toujours bien là. Sinon, il faudrait renommer le sentier par Glen Trail seulement.

 

 


12h30 (temps en mouvement : 6h30)

Le premier tiers de mon trajet est complété. Plus de 30 kilomètres pour gravir un seul sommet. Mais, ce qui s’en vient dans cette deuxième section me permettra de rayer plusieurs sommets. Le Wildcat-Carter-Moriah Range s’annonce très intéressant.

Je dois traverser une rivière pour atteindre le sentier qui m’amènera vers les sommets de Wildcat Trail. L’ascension est imposante. Un bon dénivelé. Des roches placées en escalier parfois. Ça me fait penser à l’escalier du Mordor. Près de 1h20 pour atteindre le sommet Wildcat D où un télésiège permet à des gens d’accéder à ce sommet.


15h20 (temps en mouvement : 9h20)

Me voilà au Carter Notch Hut. Mon premier ravitaillement en eau. J’ai dû faire une longue descente pour rejoindre ce refuge bordé par deux petits lacs paisibles.

Je me dirige ensuite vers les sommets du Carter Range. 45 minutes pour me retrouver au sommet du Carter Dome. Je fais un petit détour vers le Mont High que plusieurs recommandent de faire pour apprécier la vue sur 360°. J’aperçois la Présidentielle, le dernier tiers de mon parcours. Mais, je dois me rendre à Gorham avant et sur mon chemin, il y a encore 3 sommets.

 

19h07 (temps en mouvement : 13h07)

Mon dernier sommet de plus de 4000 pieds de cette section : le Mont Moriah. C’est ensuite la descente vers le village de Gorham où j’ai prévu faire une pause pour manger dans un restaurant. Même si tout semble bien aller au niveau des calories et de l’hydratation, je dois éviter toute dette d’énergie. La nuit s’en vient. Les vents seront intenses par la suite. Mais, j’aurai un ciel dégagé.

Dans ma descente, je foule le sommet du Mont Surprise. Aucun ballon. Aucune banderole. Aucune trompette. Il n’y a qu’un renard qui fuit ma présence. La fête doit être terminée…

Quelques minutes avant d’atteindre Gorham, toujours dans la forêt, je dois commencer à utiliser ma lampe frontale.

 


20h33 (temps en mouvement : 14h33)

Lorsque j’atteins la route, je me dirige vers un Subway. Je mange la moitié de mon sandwich et je bois mon jus. Je garde ma 2e moitié du sandwich et des chips pour la route.

Je profite de cet arrêt pour vérifier mon équipement. Comme je commence à avoir froid, je m’habille avec des leggings et un gilet à manche longue. Je réalise que j’ai perdu mes batteries de rechange. Elles ont dû tomber lorsque j’ai sorti ma lampe dans ma descente du Mont Surprise. J’ai tout de même deux lampes frontales mais une d’elles à une meilleure force que l’autre.

21h30 (temps en mouvement : 15h30)

J’entreprends maintenant le dernier tiers de mon parcours : la traversée de la Présidentielle en pleine nuit. Mon premier objectif est bien sûr le Mont Madison. Pour rejoindre les sentiers connus, je dois emprunter un sentier qui relie Gorham à la route du Dolly Copp Campground. J’ai lu les indications pour ce sentier mais j’aurais préféré le marcher à la clarté. La carte que j’utilise ne montre pas ce sentier. Je me rappelle que le sentier débute à la fin de la rue Promenade. C’est un sentier de véhicule tout terrain. Au loin, ma lampe frontale illumine une paire de yeux. Suis-je dans un territoire d’ours ou de cerfs de virginie? C’est quand même par-là que je dois aller. L’animal fuit. J’atteins le sentier vers Pine Mountain. Mais à peine 200 mètres parcourus que je débouche sur un autre sentier de VTT. Dois-je aller à gauche ou à droite? J’essaye vers la gauche durant 5 minutes. Mais comme je semble suivre un trajet parallèle à la rue Promenade, j’en conclus que c’est de l’autre côté mon sentier. Je trouve finalement l’entrée du sentier. Dans la montée, je commence à avoir chaud. Je suis même inconfortable. Je change de vêtements à nouveau pour retrouver mes shorts et manches courtes. Lorsque les indications m’annoncent une boucle au sommet, je n’ai pas l’intention de tourner en rond. Il y a aussi un sentier sur planches de bois dont je ne sais pas la destination. Au milieu de nulle part, je bifurque vers un campement pour rejoindre une route de gravelle. Elle me mènera finalement à l’entrée du sentier Pine Link.

23h10 (temps en mouvement : 17h10)

Ah!!! Là, j’ai un bon repère sur ma carte. Objectif : Mont Madison. Je ne veux pas dormir pour l’instant même si je sens la fatigue me gagner car je veux voir le ciel étoilé du haut des géants des Montagnes Blanches. La montée est longue. Les pas sont difficiles. Le sentier est intéressant par contre. Une belle découverte. À quelques occasions, j’arrête pour apprécier le ciel, lampe frontale fermée. Plus je monte, plus les vents sont puissants. On annonçait des vents de plus de 100 km/h dans les prévisions météo. Le facteur vent me fait ressentir un mercure tout près du zéro. Je m’habille en conséquence.

2h (temps en mouvement : 20h)

Enfin au sommet du Mont Madison. L’énergie du vent me réveille. Ma prochaine destination est Madison Hut. J’essaie de ne pas trop faire de bruit lorsque je fais le plein d’eau. Et là, je vois des bananes sur le comptoir. Ça fait de nombreuses heures que je n’ai pas mangé des fruits frais. Mon fruit favori est là, à portée de main. Je laisse 2$ sur le comptoir et je me régale d’une banane. Un petit plaisir de ma rando-course.

En quittant le refuge, je m’arrête pour observer le ciel à nouveau. C’est le temps des Perséides. En quelques minutes seulement, j’aperçois plusieurs étoiles filantes. Le spectacle est intéressant. Et le ciel est magnifique.

5h (temps en mouvement : 23h)

Le Mont Adams est déjà derrière moi. La traversée jusqu’au Mont Jefferson a été pénible. L’orientation de cairn en cairn en pleine nuit est difficile. Le sentier parsemé de grosses roches rend l’expérience encore plus difficile. Et je sens que mes chevilles collaborent moins bien qu’au début de mon aventure. Volontairement, je n’avais pas pris mes bâtons de randonnée. Mais là, que j’aimerais les avoir!!

Les premières lueurs du jour apparaissent au sommet du Mont Jefferson. Je n’ai plus besoin de ma lampe frontale. Mon prochain sommet est le Mont Washington. Je suis en manque de sommeil mais c’est surtout mes chevilles qui m’agacent. À plusieurs reprises je m’assois sur les roches pour me reposer.

7h30 (temps en mouvement : 25h30)

Au sommet du Mont Washington. Un ciel dégagé. Plein de sommets dans mon champ de vision. Je devine tous les sommets parcourus jusqu’à maintenant. C’est gigantesque tout ce que j’ai parcouru. Environ 80 kilomètres et 11 sommets rayés de ma liste.

 


11h (temps en mouvement : 29h)

Ma progression est lente jusqu’à Mizpah Spring Hut. Dans chacun des refuges, j’arrête pour faire le plein d’eau et acheter un petit quelque chose. Auparavant, à Lake of The Clouds, on m’a offert du scone bread. C’est fou tout ce que j’ai mangé depuis que j’ai quitté Gorham. Je mange beaucoup plus dans cette 3e partie de mon aventure que durant les deux premières parties.

Je me dirige ensuite vers le Mont Jackson. Mon dernier sommet de cette aventure. Initialement, j’envisageais faire les sommets sur le Willey Ridge, mais toute bonne chose à une fin et je choisi de la terminer par Webster Cliff Trail. Rien de facile pour mes chevilles. Je suis prudent et je ne fais aucun faux pas. J’ai des points de vue superbes sur la crête que j’ai laissée tomber.


14h45 (temps en mouvement : 32h45)

De retour à mon point de départ.

32h45 pour parcourir plus de 100km. Aucune idée du dénivelé mais je crois qu’il y en a beaucoup. C’est 15 sommets que je peux rayer de ma liste.

Déjà presque à la moitié. Il ne reste que 25 autres sommets à atteindre maintenant.

La suite: une 3e aventure dans les Montagnes Blanches.

Sébastien

www.sebastienroulier.com

Ce contenu a été publié dans 4000 footers, Course en sentiers, Défi, Montagnes Blanches, Trail, Ultra, White Mountains, avec comme mot(s)-clé(s) , , , , , , . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire