Mon voyage au Mont Orford – 24 heures au Défibrose Mont Orford

Photo crédit: Marco Bergeron

13934744_1082697358483740_7029427858773912094_nCourir ou marcher pendant 24 heures lors du Défibrose Mont Orford. Donner son souffle pour ceux qui en manquent. Un défi de taille pour un guerrier. Un défi à la hauteur des épreuves que vivent les personnes atteintes de fibrose kystique. Suivez-moi dans mon voyage…


Voyager, c’est se préparer à partir

« Qui a l’habitude de voyager sait qu’il vient toujours un moment où il faut partir… » -Paulo Coelho

Après avoir réalisé 25 montées et descentes du Mont Orford lors de mon défi Courir pour Leucan l’année passée, j’avais l’impression que c’était a once in a lifetime experience. Je pensais avoir tout récolté de ce défi. Les rencontres, l’énergie à la montagne. Tout était parfait. Je croyais impensable de retrouver tout cela une deuxième année.

Le projet de Fibrose Kystique Québec (FKQ) allait exactement là où je croyais que mon événement de l’année passée devait aller. Un événement ouvert à tous sur une période de plusieurs heures. Lorsque FKQ m’a approché à la Présidence d’honneur de l’événement, j’ai décidé finalement de répéter mon défi : courir 24 heures sans arrêt au Mont Orford pour peut-être dépasser ma marque de 25 montées et descentes. Un autre événement implique d’autres rencontres. C’est pourquoi, j’ai inséré mon défi pour inclure les dernières 6 heures en même temps que le Défibrose Mont Orford.

Par contre, quand j’ai ajouté ce défi à mon horaire, je croyais que ma récupération de l’Ultra-Trail du Mont Blanc (UTMB) serait rapide. L’UTMB a été plus difficile et mon corps semblait aller mieux que dans la semaine précédant mon défi au Mont Orford. Le plus raisonnable aurait été de ne pas courir.

Mais, la raison est une faculté qui nous permet de créer des limites. Et les limites n’existent que parce qu’on les croit infranchissables. La raison nous réconforte dans nos choix, nos décisions. Elle n’invite pas nécessairement au dépassement. Elle n’invite pas à grandir. Durant mon aventure à l’UTMB, un Italien m’a dit: « Il ne faut pas abandonner dans ce genre d’épreuve. Il faut vivre les défis. C’est un voyage. Un grand voyage. »

J’ai donc choisi de voyager au Mont Orford. Retrouver ma montagne pour 24 heures. Une pulsion pour voir ce qu’elle aurait à m’offrir cette année. Explorer ma passion, la course. M’investir corps et âme dans l’aventure. M’enrichir de cette expérience. Voyager l’esprit libre. Courir l’esprit libre. Parce que voyager ou courir me libère et me permet d’être moi-même.


Voyager, c’est partir

« L’instant le plus heureux d’une vie humaine est le départ vers une terre inconnue. » -Richard Burton

On n’est réellement jamais prêt pour une telle épreuve. Essentiellement, il faut laisser de côté ses habitudes, ses routines et s’ouvrir à ce qui sera nouveau, à l’imprévu. Il faut y voir des opportunités d’autoréflexion et de rencontres. Il faut être curieux et disposé à vivre l’inconnu.

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Juste avant mon départ. Photo crédit: Défibrose Mont Orford

Et quand je quitte pour ma première montée à 15h le vendredi 30 septembre, je suis prêt à foncer vers l’inconnu. Je suis déterminé à affronter mon défi. Je suis décidé à trouver un nouveau rythme loin des routines. Je suis ouvert aux nouvelles rencontres. Je suis prêt à accepter toutes les épreuves qui peuvent se dresser sur mon chemin. Je suis heureux d’être accueilli par la montagne et de l’accueillir à mon tour.


Bref, je suis résolu à être un Guerrier pacifique.

Et voilà. Le premier pas est fait. Le voyage commence. Il se terminera 24 heures plus tard. Sans jamais regarder derrière, je vais avancer.


Voyager, c’est vivre une expérience

« L’important arrive non pas au terme de la route, mais bien avant, pendant le trajet lui-même. » – Milorad Pavic

L’année passée, j’écrivais : C’est dans l’action de mon défi que j’ai compris que malgré des sentiers bien définis, j’ai découvert un territoire infini…bien ancré en moi.

Courir et marcher 24 heures au Mont Orford. Ce n’est pas qu’un déplacement dans l’espace et le temps. Même si, lors de mes montées, j’alterne entre les pistes Trois-Ruisseaux ou Grande Coulée et lors de mes descentes, j’alterne entre la 4km et la Grande Coulée, pour moi, chaque montée, chaque descente est unique. Chaque montée, chaque descente qui s’ajoute m’amène assurément vers l’exploration de ce territoire infini. Et c’est ce que je recherche dans mes défis.

Courir et marcher 24 heures au Mont Orford. Une expérience où je m’expose, où je suis le plus vulnérable. 24 heures à courir sans dormir. Sans barrière. Sans limite. Où la raison n’a pas sa place. Vous voulez connaître ma vraie nature? Il suffit de vous joindre à moi dans ce genre d’aventure…mais il vous faudra avoir l’énergie et la vitesse pour me suivre…

Courir et marcher 24 heures au Mont Orford. M’exposer à des situations nouvelles, à des difficultés pour que mon corps s’adapte. La pluie qui débute dans ma 17e montée. Mon moment le plus difficile. Je suis seul en pleine nuit. Mon corps est affaibli. J’ai froid. Mais, je n’ai pas renoncé. Un pas à la fois. Une montée à la fois. Une descente à la fois. Pour finalement rayer le nombre 16 et inscrire le nombre 17 sur mon tableau.

Courir et marcher 24 heures au Mont Orford. Bouger. Explorer le vrai monde. Vivre et s’ouvrir aux paysages, à la nature, aux rencontres. Éveiller mes sens. C’est tout ça que je vis lorsque je cours chacune des montées et descentes. Vivre l’intensité de l’instant. Et ça, la technologie ne me permettra jamais de l’atteindre. Elle abolie mes sens. Elle rend l’espèce humaine moins nomade, moins intrépide, trop sédentaire. Moi, je veux avancer.


Voyager, c’est réfléchir

« Voyager, c’est partir à la découverte de l’autre. Et le premier inconnu à découvrir, c’est vous. » -Oliver Föllmi

Réfléchir sur soi pour découvrir sa vraie nature.

Réfléchir sur tout. Philosopher en courant au Mont Orford.

Rousseau disait : « Jamais je n’ai tant pensé, tant existé, tant vécu, tant été moi, si j’ose ainsi dire, que dans [les voyages] que j’ai faits seul et à pied. La marche a quelque chose qui anime et avive mes idées : je ne puis presque penser quand je reste en place, il faut que mon corps soit en branle pour y mettre mon esprit. »

Moi, c’est la course qui avive mes pensées. Des fragments de pensées multiples sans fil conducteur. Des fragments de pensées qui surgissent au gré de ce que je vis sur la montagne. Un dialogue décousu que j’organise dans mes articles.

Et parfois, je ne pense à rien. Je vis. Mon corps en mouvement au rythme de la montagne. Un pas après l’autre, sans réfléchir.


Voyager, c’est rencontrer et partager

« Celui qui voyage sans rencontrer l’autre ne voyage pas, il se déplace. » -Alexandra David-Neel

« Chaque point de jonction, chaque rencontre est une fenêtre ouverte sur d’autres horizons. » -Isaac Sachs (Tom Hanks dans le film Cloud Atlas)

Au-delà de la montagne et des paysages, il y a les rencontres.  C’est sous le thème de donner son souffle pour la fibrose kystique que se déroulait le Défibrose Mont Orford. Et bien tous ceux qui ont croisé mon chemin, tous ces sourires ont été une source de motivation, un souffle pour réaliser mon défi. Et je suis heureux que mon chemin ait croisé des gens uniques et exceptionnels. Des gens qui m’ont accompagné pour que mon défi soit une réussite.

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Joanie Lévesque, à l’origine du Défibrose Mont Orford, et moi. Photo crédit: Défibrose Mont Orford

Il y a bien sûr les membres du comité organisateur du Défibrose Mont Orford dont Joanie Lévesque fait partie. L’événement a été une réussite grâce à elle. Il y a l’équipe du Mont Orford qui a permis la réalisation de l’événement durant la Flambée des Couleurs.  Il y a aussi les bénévoles qui apparaitront sur mon parcours après une soirée et une nuit à courir.

Alors que mon défi n’est pas encore commencé, Gaëtan s’amuse sur la montagne. Il était là l’année passée. Cette fois, ce sont 6 montées/descentes qu’il va effectuer. Nous nous croisons à quelques occasions. Il a toujours le sourire.

Puis, il y a Annie et Bianca qui s’aventurent dans la montagne sans lampe frontale au début de la soirée. Rémi apparaît vers 21h pour mes montées numéro 8, 9 et 10. Enfin un compagnon pour courir. Il me permet de retrouver un bon rythme. Et pour les 5 montées et descentes suivantes, j’ai des amis avec moi : Jean-Frédéric pour les 5 montées, Guy, pour 3 et Nghia, pour une. Ils me permettent tous de traverser la soirée et le début de la nuit. Des échanges me permettant d’oublier mes douleurs.

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Alex, David, Geneviève et Fanny qui illuminent ma nuit. Photo crédit: Un des illuminés

Mon moment le plus difficile arrive. Me voilà soudainement seul. En pleine nuit. Seul avec mes pensées. Je ressens la fatigue, la douleur. Je vous en ai glissé un mot un peu plus haut. Dans ma 17e montée, le vent se lève. Il pleut. Dans mon ascension de la Grande Coulée, il fait froid. Et puis, en arrivant au sommet, 4 amis sortent des toilettes où ils ont trouvé refuge. Bien sûr, ils sont là pour moi. C’est seulement après avoir revêtit un manteau que je remarque ce qui les illumine. Dans la descente, mon corps se réchauffe. Je gagne en lucidité et je deviens plus jasant. Bon, tout ce qui est dit n’est pas nécessairement brillant comme leurs glowsticks. Nos discussions déraillent sur renommer le Mont Orford et ses pistes en mon honneur ou encore la naissance d’une légende, le Forrest Gump des montagnes. Dans une de nos descentes, nous croisons Nancy qui est là avec son mari et sa fille pour réaliser son propre défi : 12 heures au Mont Orford. Elle parviendra à faire 8 montées et descentes de la montagne. L’impératrice Jessy nous rejoindra dans la 19e montée. Elle remettra un peu d’ordre dans le groupe juste avant que le soleil ne se lève.

Participants du Défibrose. Photo crédit: Défibrose Mont Orford

Participants du Défibrose. Photo crédit: Défibrose Mont Orford

Toute cette activité à la montagne m’amène tranquillement vers l’aube. Un nouveau jour qui sera encore plus animé avec le Défibrose. La fatigue se dissipe. Après ma 22e descente, j’arrive juste à temps pour donner le départ du Défibrose. Tous ces gens souriants vont monter et descendre la montagne pour la cause. Et je vais me nourrir de ces sourires lors de mes descentes par la piste 4km.

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Zoée, Sébastien et Christian, d’autres guerriers. Photo crédit: Jeannot Lachance

Dans ma 24e descente, mon chemin croise celui de Christian, Sébastien et Zoée. Dans mes voyages à la course, j’ai une facilité à aller vers les gens, les saluer et leur parler. J’apprends qu’ils sont des guerriers de courses à obstacles. Ça pique ma curiosité car c’est une discipline que je veux inclure dans mon horaire en 2017…après un hiver à muscler mon haut du corps. La course, je peux encore l’explorer sous plusieurs facettes… Dans cette même descente, un de mes fans, Jeannot, en profite pour me narguer en me dépassant. À 61 ans, il va faire 3 montées et descentes de la montagne. Il est lui-même une inspiration qui me pousse à poursuivre. Mais ma vitesse ne me permet pas de viser une montée rapide comme Christian et Sébastien prévoient faire. C’est donc accompagné de Zoée que j’entame ma 25e montée. Celle qui va égaler ma marque de l’année passée. Avec encore quelques heures pour ajouter d’autres montées, j’en profite pour admirer la nature et ses couleurs d’automne tout en jasant. Je n’ai jamais douté que je pouvais atteindre 26 montées. Mais 24 heures c’est un long voyage à la course…

Je réalise qu’il faut saisir les opportunités de rencontres. Chaque personne rencontrée est unique. Je crois avoir été disponible, à l’écoute, pour m’imprégner de leur vécu. Et c’est ce qui rend ce défi spécial. Les accueillir dans mon défi était le minimum que je pouvais faire.

Et, à mon tour, j’ai été accueilli avec une telle énergie durant et au terme de mon voyage.


Voyager, c’est arriver

 « Il y a plus de courage que de talent dans la plupart des réussites. » – Félix Leclerc

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Mes enfants à la fin de mon défi. Photo crédit: Jean Arel

Toute bonne chose a une fin. Samedi 1er octobre 14h50. Mon voyage se termine. Un voyage extraordinaire. Accueilli par une foule, des journalistes et la mère de Sarah-Ève Fontaine. Sarah-Ève, celle pour qui le défi était dédié, une guerrière face à sa maladie. Il y a aussi mes enfants qui assistent à mon arrivée. Je garde le sourire. En fait, je ne suis pas fatigué. Comme si mon corps s’est adapté suite à mon défi de plus de 36 heures à l’UTMB.

Et pour ce voyage, j’ai ajouté 2 montées et descentes à ma marque de l’année passée. 27 montées et descentes en moins de 24 heures. Une moyenne de 53 minutes pour monter, descendre et me ravitailler. 145 km parcourus. 13200 mètres de dénivelé positif.

Un autre défi relevé. Une autre réussite pour le Guerrier pacifique.


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À mon arrivée. Photo crédit: Marco Bergeron

Nullement besoin de traverser les frontières pour voyager. Nullement besoin de traverser les frontières pour apprécier un voyage.

Un voyage ponctué de rencontres. Un voyage inspiré par la nature. Un voyage intérieur où plusieurs fragments de pensées s’entrechoquent. Un voyage qui laisse des traces sur mon corps et mon esprit et qui me transforme.


Voyager, c’est vouloir repartir

« En faisant le tour de la terre, on finira par savoir pourquoi on vit. » – Henri Michaux

On écrit souvent que le voyageur revient chez lui pour retrouver ses racines. Un chez-soi où il se sent bien. J’ai bien l’impression que mes racines sont au Mont Orford. Je ne m’en lasse jamais. Vivre au rythme de la montagne et m’y fondre. Courir les sentiers et vivre.

Étrangement, mon corps a bien réagi à ce défi. J’ai même l’impression qu’il a accéléré la récupération de mon défi précédant. Aucunement épuisé au terme de ma course. Rempli d’une nouvelle énergie pour accomplir d’autres défis. Pour moi, chaque course, chaque défi est un passage vers une autre course ou défi. Toujours un nouveau voyage à l’horizon.

Après quelques montées et descentes du Mont Orford dans la semaine qui a suivi mon défi de 24 heures, je me suis lancé dans La Grande Traversée du Parc National du Mont Orford.

50km. 3000m de dénivelé positif. 8h05 de rando-course. En autonomie complète. Et les derniers 3 heures, à la noirceur. Un voyage seul pour réfléchir…et profiter encore de notre belle saison. Voici une vidéo de ce voyage.


La vie est remplie de paradoxes. Mes voyages à la course aussi.

Je cours pour vivre chaque jour comme si c’était le dernier. Vivre l’instant présent.

Mais, je vis chaque défi en sachant qu’il y en aura d’autres. Une quête sans fin qui m’amènera à voyager et à courir continuellement pour me découvrir et pour rencontrer.

Bien d’autres défis m’attendent.

Et à l’automne prochain, lors d’un des weekends de la Flambée des Couleurs, vous saurez où me trouver. Et peut-être que vous ferez partie des rencontres qui vont enrichir mon voyage?

« Le plus beau voyage, c’est celui qu’on n’a pas encore fait. » – Loick Peyron

Sébastien Roulier

www.sebastienroulier.com

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