Vermont 100 Mile Endurance Run: La course, toujours un apprentissage

VT100 mile Endurance Run buckleCourir 160 km. Il y a 2 ans, ce n’était même pas un objectif. Lors de la planification de ma saison de courses à l’automne2012, je me suis dit : « Pourquoi pas? ». Je vais repousser mes limites et explorer cette distance. Un autre défi.

Avec mon horaire chargé et surtout comme je planifiais mon séjour au Pays de Galles pour les Mondiaux de Trail, j’avais repoussé mes préparatifs du VT 100 à mon retour du Royaume-Uni. Je voulais profiter pleinement de mon expérience internationale. Me voilà 10 jours avant le départ du VT 100 et je dois me trouver une équipe. Dans ces longues courses, des amis peuvent suivre le coureur à différents points de rencontre pour donner de la nourriture, aider à changer les vêtements…Lors des derniers 50km, un « pacer » peut accompagner le coureur pour bien le diriger dans ses moments de délire. Sergio m’avait déjà confirmé son intérêt mais je voulais un 2e membre dans cette équipe; la gestion du véhicule est plus facile ainsi. Lors du Défi Félix DesLaurier-Hallé (CourirEnEstrie.com), le samedi précédent, je rencontre un bon coureur de la région de Sherbrooke, Guillaume, et j’apprends qu’il court à l’occasion avec Sergio. Je lui parle du VT 100 et lui propose de faire partie de mon équipe. Il accepte. Une 3e personne complétera l’équipe, Lysa, la copine de Sergio. Quelques jours avant le départ, nous aurons une petite rencontre pour discuter de la course et comment je veux qu’il m’aide à atteindre mon objectif qui est de terminer le VT 100.

Nous quittons Sherbrooke le vendredi 19 juillet pour arriver au site du départ dans l’après-midi. On y rencontre plusieurs Québécois. J’y croise aussi Josh un coureur du Massachussett qui m’avait invité à souper après la course Stone Cat de novembre. J’y rencontre un autre bon coureur de la Nouvelle Angleterre, Brian Rusiecki. Il était au Royaume-Uni lui aussi 2 semaines auparavant. Je récupère mon dossard, on effectue un examen médical sommaire (prise de la tension artérielle, pesée et questionnaire). La balance annonce 137 lb. Notre poids est vérifié à 3 endroits durant la course. Si on en perd trop ou si on en gagne, notre course est terminée. Lors du discours de la directrice de course, je commence à être nerveux.

VT 100 Elevation profile

Vermont 100 – Elevation profile

Habituellement, je suis nerveux juste avant le départ. Une bonne nervosité. Là ce qui me tracasse c’est l’épreuve à venir (160km avec un dénivelé positif et négatif de 15 000 pieds !!!) dans des conditions météos extrêmes. Il fera chaud, très chaud et humide. Depuis le matin, je m’hydrate mais la sensation de chaleur 12h avant le départ est désagréable. Par chance, j’ai réservé une chambre d’hôtel à 30 minutes du site. Un p’tit tour à la piscine et une bonne nuit de sommeil sont au rendez-vous.

VT 100 Start of the raceLe départ est à 4h du matin à la noirceur. Il faut utiliser une lampe frontale. Je me lève à 2h du matin, juste un peu plus tôt que d’habitude…Je déjeune et prépare mon équipement : soulier Asics DS Trainer (le parcours est surtout sur des routes de terre), camisole, Veste UltrAspire Spry, Amphipod Handheld. Mes équipiers sont debout à 2h30 et nous quittons l’hôtel vers 3h pour une longue journée. Il y a eu un orage durant la nuit. La température est plus agréable. Sur le site du départ, c’est la fébrilité. Quelques minutes avant le départ, il y a des feux d’artifice au loin sur une colline. C’est la 25e édition de la course, ça se fête. Et c’est parti. Je me promets de courir lentement mais de profiter de la fraîcheur. Je m’hydrate bien et je prends mes gels. Sur une section de route, j’y vais très conservateur mais je réaliserai plus tard que cette cadence était trop rapide quand même. Je dépasse quelques coureurs. Vers le 30e km, je rejoins Michael Dixon du NJ. Il m’apprend que nous sommes en tête. Ah merde…exactement où je ne voulais pas être. Je me sens bien pourtant et je ne force rien dans les descentes. Il y a près de 30 ravitaillements sur le parcours mais seulement 8 où mon équipe peut me rejoindre. VT 100 Race crewMes amis sont au rendez-vous après 3h de course pour que je fasse le plein. J’aurai toujours la même routine à chacune de nos rencontres : changer ma veste UltrAspire Spry pour une nouvelle remplie de gels et d’eau, changer de gourde à la main pour une nouvelle avec du ProCircuit X1, boire un jus, du lait au chocolat et manger une purée de pommes. Je prendrai aussi quelques chips et des fruits disponibles sur le parcours. Je repars. La température collabore toujours. Je serai en tête jusqu’au 70e km environ. Je croise quelques coureurs du 100km dont Frédéric. J’arrive au Camp 10 Bear en 2e position après 77 km de course. Il commence à faire chaud. Les éponges d’eau froide aident à me refroidir. Je change mes Asics DS Trainer pour ma 2e paire de soulier identique. Les montées qui suivront seront difficiles. La chaleur commence à m’affecter. Je croise Marie-Pier du Québec qui terminera 2e chez les femmes au 100km. Elle a toujours le sourire. Moi aussi…je crois. À chacun des ravitaillements importants, je croiserai son équipe dynamique, Carmen et Alain. Je passe la mi-parcours en 7h35 environ. L’agonie s’installe tranquillement par contre. Les montées sont difficiles. Deux coureurs me rattrapent, Nick et Jason. Peu de temps après, c’est Brian et Josh. Avant de retourner à nouveau à Camp 10 Bear au km 114, je serai en 8e position. Il reste 46 km. À ce ravitaillement, je note la présence de Michel. Je suis encore assez lucide pour réaliser qu’il a arrêté sa course. Je reçois ses encouragements et ceux de Rachel, celle qui devait le pacer. Et là débute le plus long marathon de ma vie…46km en 6h35…

VT 100 Race pacerC’est Sergio qui m’accompagne pour les premiers 11km, puis Guillaume pour 18km et enfin Sergio à nouveau pour les 17km restants. L’alimentation et l’hydratation sont difficiles. Mes quadriceps sont durs comme des roches. Les montées, je dois les marcher. Les descentes, j’y vais avec une cadence très légère. Dès qu’il y a des sections en sentiers, je me sens un peu mieux. J’ai l’impression d’avoir atteint une limite et je ne veux pas causer plus de dommages. Mes connaissances médicales me font craindre la rhabdomyolyse et l’insuffisance rénale. Mes urines sont de la bonne couleur, je peux poursuivre. Pendant des heures, j’aurai l’impression d’avancer à pas de tortue. Mais au moins, j’avance. Mes pacers m’encouragent. L’idée d’abandonner se pointe à l’occasion mais est vite écartée. J’ai peu d’énergie pour admirer les paysages. On dirait que ça monte toujours et dans les descentes, je regarde où je mets les pieds. Un pied devant l’autre. J’avance. « Engagez-vous qu’ils disaient !!». Un cerf court vers le bois, un bébé ours traverse le chemin à quelques pas de moi. Heureusement, mes pacers les voient aussi. J’ai atrocement mal…mais j’avance. La nuit tombe. Je suis épuisé. Je n’ai qu’une idée, terminer cette course et me baigner à la piscine de l’hôtel. Je ne parle plus, je murmure. Je n’ai plus beaucoup d’énergie…mais j’avance. Et voilà, dernier ravito. Ça se termine bientôt. Un peu plus loin, j’entends la musique. Mais quel détour nous font-ils prendre? On monte dans la noirceur. Et puis des lumières au sol. La fin approche. J’accélère. J’annonce mon numéro de dossard à un garçon qui le communique au finish area. « 2-6-1 ». La musique est plus forte. Ça descend. On annonce : « Runner is coming ». C’est moi ça. Je traverse l’arche. ENFIN…!!!

VT 100 finish_2 VT 100 FinishJe suis accueilli par ma super équipe ainsi que Michel Caron. Je leur dis : « Plus jamais ». Mais il ne faut pas croire un coureur qui dit ça. Je suis vidé mais j’ai le sourire. On me dit que je suis 7e. J’apprendrai plus tard que Josh a choisi d’arrêter sa course à cause d’une rhabdomyolyse. C’est une vraie course d’attrition : on commence 325, 205 termine l’épreuve dans le temps requis, sous les 30 heures. Je termine en 17h43. Il est 21h43. La piscine ferme à minuit. Je me dirige vers la tente médicale où on sert des repas. Je n’ai pas faim. Je rejoins d’autres coureurs qui ont terminé avant moi pour jaser. VT 100 End of race dayEn me relevant, je me sens étourdi et je dois m’allonger pour ne pas perdre connaissance. Ma pression est basse. Je dois récupérer. Je bois un peu. Je reprends mes couleurs. Mes équipiers sont rassurés de me voir un peu mieux et ils s’endorment tous. On oubli la piscine. Le seul objectif que je n’aurai pas atteint. Je dois récupérer. J’ai droit aux soins de doc Patrick Touzin qui m’apporte à manger et à boire. Je m’hydrate, je mange un peu. Je me sens mieux. Nous retournons à l’hôtel pour une bonne nuit de sommeil.

Le lendemain, c’est la remise des prix. Déjà j’ai commencé l’analyse de ma course. Je réalise que j’ai accompli tout un exploit. Compléter ma course. Malgré une fin de parcours atroce, la tête a tenu. Je termine 7e, parmi les coureurs élites. On appelle le top 10 pour la boucle de ceinture spéciale. Je suis au côté de Ian Sharman, Nick Clark, Brian Rusiecki, Jason Lantz, Chad Ricklefs.

Photo: SmugMug<br /><br /><br /><br /><br /> Top 10

J’oublie mes mésaventures et je me dis que je dois apprendre de cette expérience…et que la prochaine fois, ça ne peut qu’aller mieux. Je devrai m’entraîner beaucoup en montée et en descente. Je devrai apprendre à ralentir la cadence. Je devrai améliorer mon alimentation. À cet effet, j’aurai la chance de profiter des conseils d’un nouveau partenaire : Pro Circuit Endurance.

L’année passée, à pareille date, je parcourais près de 100km dans les Sentiers de l’Estrie. Une aventure difficile de 16h45. Je vais utiliser les mêmes mots qu’à l’époque pour conclure ce résumé :

Mon corps a guéri, ma tête a grandi…Prêt pour d’autres aventures.

Eh oui, il y aura une autre course de 100 miles.

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